Au Liban, il y a un détail qui semble avoir échappé aux analystes et observateurs, à savoir cet ultimatum lancé par les Yankee aux Libanais au-delà de quoi, les négociations gazières indirectes Israël/Liban pourraient échouer. En effet, l'annonce d'une date butoir par l'Amérique pour le tracé de la frontière maritime séparant le Liban des territoires occupés de la Palestine viserait surtout à suggérer l’affaiblissement du gouvernement consensuel de Mikati, un peu à l'image de l'affaire Kadhafi et ce évidemment dans l"intérêt des partis pro-US au seuil des législatives libanaises sur quoi l’ambassade US a trop compté pour éliminer le Hezbollah. Il y a quelques semaines, le nouveau médiateur américain dans le processus de négociation indirecte pour le tracé des frontières maritimes entre le Liban et Israël, l'Israélo-américain Amos Hochstein, a annoncé que les deux parties auraient jusqu'en mars 2022 pour parvenir à un accord dans ce domaine.
Le médiateur a également menacé que son entremise dans le processus des pourparlers serait interrompue si les parties négociatrices ne s'entendaient pas pour démarquer les frontières maritimes. Mais quels sont les objectifs que cherche Washington à travers cet ultimatum et cette date échéance? Les Américains sont-ils en train de chercher à gagner des points pour le courant politique pro-américain à l'approche des élections législatives libanaises ou s'efforcent-ils surtout à baliser le terrain via l'échec des négociations, pour l’opération de forage sur le champ gazier de Karish par Israël? À vrai dire les deux.
De nombreux problèmes, notamment au niveau politique au Liban, ont retardé la prise de décision concernant la détermination d’un mécanisme de négociations indirectes pour délimiter la zone maritime entre le Liban et Israël, parce que le Premier ministre Najib Mikati faisait partie d'un gouvernement intérimaire en 2013 qui n'a tenu aucune réunion à ce propos, et la même chose semble se produire aujourd'hui. Et toutes ces questions affectent également le secteur pétrolier et gazier libanais. Selon les informations disponibles, un permis de forage était censé être délivré dans les eaux du Liban en 2019, mais cela a été reporté en raison du déclenchement de l'épidémie du Covid-19 et de la situation politique et de l'effondrement économique du pays qui s'en est suivi. Le mécanisme de démarrage du forage et de l'exploration énergétique a maintenant repris, et le ministre libanais de l'Énergie, Walid Fayyaz, en assure le suivi. Cependant, en raison des conditions politiques, sécuritaires et économiques défavorables dans lesquelles se trouve le Liban, il n'est pas possible d'être sûr que les résultats de ces mesures seront efficients pour les Libanais, note El-Nashra.
Les experts tirent également la sonnette d’alarme sur les conditions que certaines entreprises déterminent pour le forage dans les eaux libanaises. La démarcation de la frontière maritime sioniste par les Libanais doit être effectuée en effet avant que l'exploration pétrolière et gazière ne puisse commencer afin que la zone économique libanaise soit reconnue. Or pour des raisons politiques et des obstacles, les dialogues indirects avec Israël sur le tracé des frontières maritime a été reporté et les mesures nécessaires n'ont pas été prises pour le forage dans les eaux libanaises. Disons que les propos du responsable américain qui affirmait que le forage ne serait pas effectué dans la zone contestée jusqu'à ce qu'une démarcation précise ne soit faite, contredisent les actions d’Israël, qui a déjà commencé le forage dans la zone contestée sans tracer de frontières maritimes claires avec le Liban. Alors pourquoi, fixer une échéance pour l'accord entre le Liban et Israël ? Est-ce que Washington a l’intention d’alimenter la crise libanaise et faire gagner des points à ses partisans politiques au seuil des législatives ? Il paraît que les États-Unis tentent d'accuser l'équipe du président et ses alliés d'entraver le processus de négociations indirectes sur la démarcation des frontières et ainsi de priver le Liban de ses ressources pétrolières et gazières dans le sens des intérêts israéliens; poursuit El-Nashra qui ajoute :
Mais ceci n'est qu'un premier niveau de lecture. En effet ce que le journal libanais semble ne pas voir c'est la totale interconnexion de cette affaire avec l'actualité syrienne d'une part et celle liée aux pétroliers iraniens continuant à l'heure qu'il est à livrer pour le troisième mois consécutif du mazot au Liban de l'autre. Il y a quelques jours, le secrétaire général du Hezbollah s'est livré lors d'un discours à l'éclaircissement sur ce vaste projet de corridor maritime anti sanction Iran-Syrie-Liban qui entré en fonction depuis le mois d'août continue à alimenter les ports, les hôpitaux, les orphelinats et autres institutions libanaises en carburant.
Or là encore ce fut Israël qui en a subi les éclats. Car que soit dit en passant, le pétrole de Deir ez-Zor, c'est à Erbil qu'il est chargé à destination de la Turquie et ce, pour que les pétroliers turcs ou grecs ou chypriotes le ramène à Ashkelon. Les toutes dernières attaques anti-US en Syrie le prouvent, c'est ce trafic qui est désormais dans le viseur. Reste à savoir si les tergiversations d'Amos Hochstein visant à faire gagner la partie à Israël dans son litige avec le Liban seraient suffisantes pour colmater la brèche. Plus d'un dirait que le jeu ne vaut peut-être pas la chandelle quand Israël a en face les missiles du Hezbollah. Mais c'est mieux que rien quand des Accords d'Abraham, il ne reste plus rien, surtout rien de ce fameux pipeline Émirats-Eilat qui devait aider Israël à se joindre à l'Europe à la fois pour rivaliser la Russie puis boucher l'horizon à la Syrie et évidemment au Liban.